Travail de nuit : les Mauriciens sont- ils prêts ?
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maurice
Valérie OLLA, L'Express
Afin que le 24/ 7devienne la norme, le HRDC alancé une campagne de sensibilisation sur 14 mois. Une tendance se décline :les employés rechignent àtravailler hors du créneau 9heures –16 heures.
IL y a quelques jours, le Human Resource Development Council ( HRDC) procédait au lancement d’une campagne de sensibilisation sur le 24/ 7.
Mondialisation oblige, les horaires traditionnels de 9 heures à 16 heures seront bientôt qu’un lointain souvenir. Mais les Mauriciens sont- ils prêts à changer leurs heures de travail ? Le Dr Kaviraj Sukon, directeur par intérim du Human Resource Development Council ( HRDC) donne le ton : « Les gens ne veulent pas travailler en dehors du traditionnel 9 heures - 16 heures. » Eddy Jolicoeur, directeur des Ressources humaines du groupe Mauritius Commercial Bank ( MCB), souligne d’emblée que c’est « la bataille du changement de mentalité qu’il faudra gagner » . Il est d’avis que le 24/ 7 est une question d’état d’esprit. Qu’il faut arriver à trouver l’équilibre entre la vie professionnelle et la vie sociale.
Mais ce pas, certains l’ont déjà franchi. La force policière, les sapeurs- pompiers, les services météorologiques, les activités de transport et de logistique, l‘ aviation, les services de santé, l’hôtellerie et l’externalisation sont autant de secteurs qui fonctionnent selon le modèle 24/ 7. Mais comment étendre ce modèle à tous les secteurs ? Azad Jeetun, directeur de la Mauritius Employers Federation ( MEF), soutient qu’il est impératif de conscientiser les gens afin qu’ils changent leurs habitudes.
« Bien sûr, il leur faudra un temps d’adaptation, mais cela leur donnera plus de flexibilité et davantage d’opportunités. » Azad Jeetun ajoute que, graduellement, il y aura une évolution.
« Il y a d’ailleurs déjà eu évolution.
Dans les années 70, quand on demandait aux gens de travailler trois shift, ils refusaient. Ce n’était pas dans notre culture. A l’époque, c’était le 9 heures – 16 heures. Aujourd’hui, cette pratique, si elle a toujours cours dans le secteur public, est révolue dans le secteur privé » , soutient le directeur de la MEF. Que ce soit dans le textile, l’externalisation ou l’hôtellerie, les employés se sont habitués à ces nouveaux horaires.
« Il faut désormais l’étendre à d’autres secteurs d’activité. » Quoique dans l’hôtellerie, on note une nouvelle tendance.
Kamlesh Moonshiram, directeur des ressources humaines à l’hôtel Sugar Beach , note que l’attitude des gens a changé.
Surtout celle des jeunes. « Dans le passé, les gens s’adaptaient très vite.
Ils ne rechignaient pas à travailler les shift de l’après- midi ou l’ overnight, de 23 heures jusqu’au lendemain matin, raconte Kamlesh Moonshiram. Mais depuis trois ou quatre ans, les jeunes recherchent davantage des heures bureau. Ils aiment consacrer pas mal de temps à leurs loisirs et ne veulent surtout pas travailler les week- ends et les jours fériés. » De plus, ceux ayant une licence ou davantage, acceptent difficilement de commencer au bas de l’échelle. « Ils recherchent d’emblée un poste comme assistant manager ou manager » , souligne Kamlesh Moonshiram. Alors, pour pourvoir aux postes dans la restauration, le front office ou le housekeeping , ils embauchent des jeunes qui ont échoué, par exemple, au niveau de la Form III et les forment. « Nous arrivons tant bien que mal à trouver des gens car ceux- là n’ont pas vraiment le choix. »
S’ils sont grassement payés...
Tel est le cas également dans le secteur de l’externalisation. Vidia Mooneegan, président de l’ Out - sourcing and Telecommu nication Association of Mauritius ( OTAM), dit avoir constaté que « les gens vont tout le temps chercher des emplois plus faciles. C’est uniquement lorsqu’ils n’ont pas le choix qu’ils consentent à travailler en dehors des horaires traditionnels » . Ou alors, uniquement s’ils sont grassement payés. C’est le cas dans l’ offshore . « Nos employés sont des professionnels qui ont toujours travaillé en dehors des heures de bureau traditionnels. Ils sont bien, même très bien, payés pour cela. C’est une motivation, soutient Kee Chong Lee Kwong Wing, président de Mauritius International Trust Co. Ltd. Mais il est vrai que s’ils étaient mieux payés dans le gouvernement pour des horaires de 9 heures à 16 heures, ils ne travailleraient pas chez nous. » Il y a aussi ceux qui quittent à peine les bancs du collège et qui sont plus disposés à accepter de travailler la nuit car ils n’ont pas de contraintes familiales. Pas d’époux ou d’épouse, ni d’enfants. Mais quand même des parents. Et quelques fois, des parents qui n’acceptent pas que leurs progénitures travaillent à des heures « indues » . Le plus dur est de trouver des employés pour des horaires après minuit. « Là aussi, un changement de mentalité est impératif car certains parents ne voient pas d’un bon oeil le travail de nuit » , soutient Vidia Mooneegan. Le Dr Kaviraj Sukon déplore la « peer pressure » et cite le cas d’une jeune fille qui avait fait une maîtrise en Tourism Management et dont les parents n’ont pas voulu qu’elle travaille à l’hôtel à cause du qu’en- dira- t- on.
Radakrishna Sadien, président de la Government Servants Association ( GSA) et de la State Employees Federation ( SEF), comprend que pour certains fonctionnaires, ce sera peut- être difficile d’accepter de travailler à d’autres horaires que le traditionnel 9 heures à 16 heures. Toute - fois, il concède que « ceux qui ne sont pas prêts à accepter le changement vont être vite dépassés » . Il faudra, dit- il, leur faire comprendre, à travers la formation et la sensibilisation, quel est leur rôle : celui de servir le public. « S’ils ne veulent pas le comprendre et s’adapter, il faudra qu’ils cherchent ailleurs. » Eddy Jolicoeur reste persuadé que les Mauriciens peuvent s’adapter. « Je ne crois pas que les gens n’ont pas envie de travailler. Mais pour qu’eux qu’ils sortent de leur zone de confort, il faut qu’ils aient la possibilité de vaquer à leurs occupations à 21 heures comme ils l’auraient fait à 16 heures. » Soit avoir accès au transport, à la restauration, aux loisirs et à la sécurité 24/ 7…
Afin que le 24/ 7devienne la norme, le HRDC alancé une campagne de sensibilisation sur 14 mois. Une tendance se décline :les employés rechignent àtravailler hors du créneau 9heures –16 heures.
IL y a quelques jours, le Human Resource Development Council ( HRDC) procédait au lancement d’une campagne de sensibilisation sur le 24/ 7.
Mondialisation oblige, les horaires traditionnels de 9 heures à 16 heures seront bientôt qu’un lointain souvenir. Mais les Mauriciens sont- ils prêts à changer leurs heures de travail ? Le Dr Kaviraj Sukon, directeur par intérim du Human Resource Development Council ( HRDC) donne le ton : « Les gens ne veulent pas travailler en dehors du traditionnel 9 heures - 16 heures. » Eddy Jolicoeur, directeur des Ressources humaines du groupe Mauritius Commercial Bank ( MCB), souligne d’emblée que c’est « la bataille du changement de mentalité qu’il faudra gagner » . Il est d’avis que le 24/ 7 est une question d’état d’esprit. Qu’il faut arriver à trouver l’équilibre entre la vie professionnelle et la vie sociale.
Mais ce pas, certains l’ont déjà franchi. La force policière, les sapeurs- pompiers, les services météorologiques, les activités de transport et de logistique, l‘ aviation, les services de santé, l’hôtellerie et l’externalisation sont autant de secteurs qui fonctionnent selon le modèle 24/ 7. Mais comment étendre ce modèle à tous les secteurs ? Azad Jeetun, directeur de la Mauritius Employers Federation ( MEF), soutient qu’il est impératif de conscientiser les gens afin qu’ils changent leurs habitudes.
« Bien sûr, il leur faudra un temps d’adaptation, mais cela leur donnera plus de flexibilité et davantage d’opportunités. » Azad Jeetun ajoute que, graduellement, il y aura une évolution.
« Il y a d’ailleurs déjà eu évolution.
Dans les années 70, quand on demandait aux gens de travailler trois shift, ils refusaient. Ce n’était pas dans notre culture. A l’époque, c’était le 9 heures – 16 heures. Aujourd’hui, cette pratique, si elle a toujours cours dans le secteur public, est révolue dans le secteur privé » , soutient le directeur de la MEF. Que ce soit dans le textile, l’externalisation ou l’hôtellerie, les employés se sont habitués à ces nouveaux horaires.
« Il faut désormais l’étendre à d’autres secteurs d’activité. » Quoique dans l’hôtellerie, on note une nouvelle tendance.
Kamlesh Moonshiram, directeur des ressources humaines à l’hôtel Sugar Beach , note que l’attitude des gens a changé.
Surtout celle des jeunes. « Dans le passé, les gens s’adaptaient très vite.
Ils ne rechignaient pas à travailler les shift de l’après- midi ou l’ overnight, de 23 heures jusqu’au lendemain matin, raconte Kamlesh Moonshiram. Mais depuis trois ou quatre ans, les jeunes recherchent davantage des heures bureau. Ils aiment consacrer pas mal de temps à leurs loisirs et ne veulent surtout pas travailler les week- ends et les jours fériés. » De plus, ceux ayant une licence ou davantage, acceptent difficilement de commencer au bas de l’échelle. « Ils recherchent d’emblée un poste comme assistant manager ou manager » , souligne Kamlesh Moonshiram. Alors, pour pourvoir aux postes dans la restauration, le front office ou le housekeeping , ils embauchent des jeunes qui ont échoué, par exemple, au niveau de la Form III et les forment. « Nous arrivons tant bien que mal à trouver des gens car ceux- là n’ont pas vraiment le choix. »
S’ils sont grassement payés...
Tel est le cas également dans le secteur de l’externalisation. Vidia Mooneegan, président de l’ Out - sourcing and Telecommu nication Association of Mauritius ( OTAM), dit avoir constaté que « les gens vont tout le temps chercher des emplois plus faciles. C’est uniquement lorsqu’ils n’ont pas le choix qu’ils consentent à travailler en dehors des horaires traditionnels » . Ou alors, uniquement s’ils sont grassement payés. C’est le cas dans l’ offshore . « Nos employés sont des professionnels qui ont toujours travaillé en dehors des heures de bureau traditionnels. Ils sont bien, même très bien, payés pour cela. C’est une motivation, soutient Kee Chong Lee Kwong Wing, président de Mauritius International Trust Co. Ltd. Mais il est vrai que s’ils étaient mieux payés dans le gouvernement pour des horaires de 9 heures à 16 heures, ils ne travailleraient pas chez nous. » Il y a aussi ceux qui quittent à peine les bancs du collège et qui sont plus disposés à accepter de travailler la nuit car ils n’ont pas de contraintes familiales. Pas d’époux ou d’épouse, ni d’enfants. Mais quand même des parents. Et quelques fois, des parents qui n’acceptent pas que leurs progénitures travaillent à des heures « indues » . Le plus dur est de trouver des employés pour des horaires après minuit. « Là aussi, un changement de mentalité est impératif car certains parents ne voient pas d’un bon oeil le travail de nuit » , soutient Vidia Mooneegan. Le Dr Kaviraj Sukon déplore la « peer pressure » et cite le cas d’une jeune fille qui avait fait une maîtrise en Tourism Management et dont les parents n’ont pas voulu qu’elle travaille à l’hôtel à cause du qu’en- dira- t- on.
Radakrishna Sadien, président de la Government Servants Association ( GSA) et de la State Employees Federation ( SEF), comprend que pour certains fonctionnaires, ce sera peut- être difficile d’accepter de travailler à d’autres horaires que le traditionnel 9 heures à 16 heures. Toute - fois, il concède que « ceux qui ne sont pas prêts à accepter le changement vont être vite dépassés » . Il faudra, dit- il, leur faire comprendre, à travers la formation et la sensibilisation, quel est leur rôle : celui de servir le public. « S’ils ne veulent pas le comprendre et s’adapter, il faudra qu’ils cherchent ailleurs. » Eddy Jolicoeur reste persuadé que les Mauriciens peuvent s’adapter. « Je ne crois pas que les gens n’ont pas envie de travailler. Mais pour qu’eux qu’ils sortent de leur zone de confort, il faut qu’ils aient la possibilité de vaquer à leurs occupations à 21 heures comme ils l’auraient fait à 16 heures. » Soit avoir accès au transport, à la restauration, aux loisirs et à la sécurité 24/ 7…