Bourse africaine de marchandises pour des produits agricoles
Thématique :
afrique
ADDIS ABEBA, Ethiopie, 7 novembre 2008
Pays qui souffre de pénuries alimentaires et de sous-alimentation chroniques, l’Éthiopie a ouvert, en avril 2008, la première Bourse africaine de marchandises pour des produits agricoles (café, graines de sésame, légumineuses, teff (sorte de mil), blé et maïs) en vue de tenter d’augmenter la production vivrière en créant un marché agricole sûr et transparent.
L’idée de créer une Bourse de marchandises provient d’une ancienne économiste de la Banque mondiale, Mme Eleni Gabre-Madhin, qui est née en Éthiopie et qui a fait ses études aux États-Unis. Après avoir rédigé une thèse de doctorat sur le rôle des forces du marché dans les pays en développement, elle a travaillé à l’Institut international de recherche sur la politique alimentaire. Elle est actuellement à la tête de la nouvelle Bourse de marchandises.
Selon Mme Gabre-Madhin, le gouvernement éthiopien a commencé d’envisager la création d’une Bourse de marchandises à la suite de la crise alimentaire des années 2002 et 2003. La production exceptionnelle et l’effondrement des prix en 2002 avaient alors été suivis d’une sécheresse et d’une famine qui avaient touché 14 millions d’Éthiopiens l’année suivante.
« Lors de la production exceptionnelle, les prix ont tellement baissé que les agriculteurs ne pouvaient pas rembourser leurs emprunts malgré l’abondance de leur récolte. L’année suffisante, la production vivrière n’a pas été suffisante pour subvenir aux besoins de la population, ce qui a conduit les pouvoirs publics à se poser des questions au sujet des forces du marché dont : « Pourquoi les gens ne mettent-ils pas de côté des céréales d’une année à l’autre ? Pourquoi le marché ne peut-il pas livrer des produits agricoles en période difficile et en stocker durant les bonnes périodes ? », a-t-elle dit.
Bien que l’Éthiopie soit le plus gros producteur de céréales d’Afrique, ses débouchés traditionnels sont réduits. « La plupart des agriculteurs vendent leur production dans un rayon de 12 kilomètres autour de leur exploitation et uniquement à des personnes qu’ils connaissent » et en qui ils ont confiance, a indiqué Mme Gabre-Madhin. Plus des deux tiers des agriculteurs n’ont pas été payés à un moment ou à un autre pour la vente de leur production, et seulement un petit pourcentage ont eu recours à la justice pour se faire payer.
Dans le système traditionnel d’achat et de vente, les céréales changent de main quatre à cinq fois entre le producteur et le consommateur. À chaque fois, les céréales sont mises dans un nouveau sac. Ce système permet à l’acheteur de savoir ce qu’il obtient en ce qui concerne la qualité et la quantité, car le contenu est chaque fois inspecté et pesé, mais il se heurte à de fortes fluctuations de prix.
Grâce à une aide de 1 million de dollars de l’Agence des États-Unis pour le développement international, la Bourse éthiopienne de marchandises a commencé ses activités il y a moins de neuf mois. Elle favorise la transparence et la prévisibilité sur le marché national et permet de vendre les produits agricoles éthiopiens sur le marché mondial.
Cette Bourse fournit des entrepôts, un système de paiement fiable, des informations en temps réel sur le marché et un contrôle de la qualité. Les agriculteurs vendent directement leurs produits à la Bourse de marchandises, qui les règlent dans un délai de vingt-quatre heures.
« Auparavant, c’étaient les chauffeurs de camion qui prenaient avec eux le paiement des produits agricoles dans des enveloppes pleines d’argent liquide. On ne savait jamais pour sûr si l’argent parviendrait bien au vendeur ou s’il en recevrait la totalité », a dit Mme Gabre-Madhin. En outre, dans le système traditionnel d’achat et de vente, les acheteurs ne sont pas sûrs de la qualité de ce qu’ils obtiennent tant qu’ils n’ont pas ouvert les sacs et vérifié leur contenu. La Bourse de marchandises a assumé la tâche d’évaluer la qualité et de la garantir, de sorte qu’un acheteur qui n’est pas sur place peut être sûr de ce qu’il va obtenir.
La Bourse éthiopienne de marchandises est en relation avec diverses Bourses de marchandises à travers le monde, ce qui fait qu’un négociant de l’Inde peut, par exemple, acheter à terme des lentilles éthiopiennes, qui sont très recherchées.
Quant au principal produit d’exportation de l’Éthiopie, le café, 461 producteurs sont devenus membres de la nouvelle Bourse pour une période d’un an. « Nous allons disséminer les cours de New York dans notre Bourse, et nous transmettrons nos cours à la Bourse de New York. Il s’ensuit que si on examine les cours du café éthiopien, du café colombien ou du café rwandais, on aura une base de comparaison », a dit Mme Gabre-Madhin.
Les négociants de produits agricoles sont nombreux à demander à devenir membre de la Bourse de marchandises, ce qui constitue un signe, selon elle, de la confiance des intervenants sur le marché. « Les inquiétudes au sujet du paiement et de la qualité du produit sont ainsi supprimées », a-t-elle indiqué.
Il est probable que les agriculteurs seront incités à vendre une plus grande partie de leurs produits sur le marché. Dans le système traditionnel, seulement un quart de la récolte de céréales est vendu sur le marché. Il s’agit maintenant que la Bourse de marchandises traite de la moitié de la production de céréales du pays d’ici à cinq ans.
Mme Gabre-Madhin a fait remarquer que la moitié des ménages ruraux de son pays achetaient plus de vivres qu’ils n’en produisaient. « Les gens pauvres achètent des vivres et en vendent aussi, ce qui veut dire que les marchés sont très importants, même pour des personnes dont le revenu est faible. »
La Bourse de marchandises fait cependant l’objet de critiques. Certains disent qu’elle ne va pas bien fonctionner parce que des représentants du gouvernement occupent 6 des 11 sièges de son conseil d’administration. Mme Gabre-Madhin estime quant à elle que la participation du gouvernement permettra à ce dernier d’apprendre rapidement comment l’économie de marché fonctionne.
Une autre préoccupation a trait au fait que la Bourse de marchandises est susceptible de contribuer à l’accroissement des prix alimentaires, qui ont doublé au cours de l’année écoulée. Si les pays limitrophes de l’Éthiopie achètent ses produits agricoles, il y aura alors moins de vivres pour ceux qui souffrent déjà de sous-alimentation dans le pays, disent des critiques.
Ce à quoi Mme Gabre-Madhin répond en disant que la Bourse de marchandises n’est pas une panacée pour les problèmes alimentaires de l’Éthiopie, mais qu’elle constitue un élément important d’une économie fondée sur l’agriculture.
Pays qui souffre de pénuries alimentaires et de sous-alimentation chroniques, l’Éthiopie a ouvert, en avril 2008, la première Bourse africaine de marchandises pour des produits agricoles (café, graines de sésame, légumineuses, teff (sorte de mil), blé et maïs) en vue de tenter d’augmenter la production vivrière en créant un marché agricole sûr et transparent.
L’idée de créer une Bourse de marchandises provient d’une ancienne économiste de la Banque mondiale, Mme Eleni Gabre-Madhin, qui est née en Éthiopie et qui a fait ses études aux États-Unis. Après avoir rédigé une thèse de doctorat sur le rôle des forces du marché dans les pays en développement, elle a travaillé à l’Institut international de recherche sur la politique alimentaire. Elle est actuellement à la tête de la nouvelle Bourse de marchandises.
Selon Mme Gabre-Madhin, le gouvernement éthiopien a commencé d’envisager la création d’une Bourse de marchandises à la suite de la crise alimentaire des années 2002 et 2003. La production exceptionnelle et l’effondrement des prix en 2002 avaient alors été suivis d’une sécheresse et d’une famine qui avaient touché 14 millions d’Éthiopiens l’année suivante.
« Lors de la production exceptionnelle, les prix ont tellement baissé que les agriculteurs ne pouvaient pas rembourser leurs emprunts malgré l’abondance de leur récolte. L’année suffisante, la production vivrière n’a pas été suffisante pour subvenir aux besoins de la population, ce qui a conduit les pouvoirs publics à se poser des questions au sujet des forces du marché dont : « Pourquoi les gens ne mettent-ils pas de côté des céréales d’une année à l’autre ? Pourquoi le marché ne peut-il pas livrer des produits agricoles en période difficile et en stocker durant les bonnes périodes ? », a-t-elle dit.
Bien que l’Éthiopie soit le plus gros producteur de céréales d’Afrique, ses débouchés traditionnels sont réduits. « La plupart des agriculteurs vendent leur production dans un rayon de 12 kilomètres autour de leur exploitation et uniquement à des personnes qu’ils connaissent » et en qui ils ont confiance, a indiqué Mme Gabre-Madhin. Plus des deux tiers des agriculteurs n’ont pas été payés à un moment ou à un autre pour la vente de leur production, et seulement un petit pourcentage ont eu recours à la justice pour se faire payer.
Dans le système traditionnel d’achat et de vente, les céréales changent de main quatre à cinq fois entre le producteur et le consommateur. À chaque fois, les céréales sont mises dans un nouveau sac. Ce système permet à l’acheteur de savoir ce qu’il obtient en ce qui concerne la qualité et la quantité, car le contenu est chaque fois inspecté et pesé, mais il se heurte à de fortes fluctuations de prix.
Grâce à une aide de 1 million de dollars de l’Agence des États-Unis pour le développement international, la Bourse éthiopienne de marchandises a commencé ses activités il y a moins de neuf mois. Elle favorise la transparence et la prévisibilité sur le marché national et permet de vendre les produits agricoles éthiopiens sur le marché mondial.
Cette Bourse fournit des entrepôts, un système de paiement fiable, des informations en temps réel sur le marché et un contrôle de la qualité. Les agriculteurs vendent directement leurs produits à la Bourse de marchandises, qui les règlent dans un délai de vingt-quatre heures.
« Auparavant, c’étaient les chauffeurs de camion qui prenaient avec eux le paiement des produits agricoles dans des enveloppes pleines d’argent liquide. On ne savait jamais pour sûr si l’argent parviendrait bien au vendeur ou s’il en recevrait la totalité », a dit Mme Gabre-Madhin. En outre, dans le système traditionnel d’achat et de vente, les acheteurs ne sont pas sûrs de la qualité de ce qu’ils obtiennent tant qu’ils n’ont pas ouvert les sacs et vérifié leur contenu. La Bourse de marchandises a assumé la tâche d’évaluer la qualité et de la garantir, de sorte qu’un acheteur qui n’est pas sur place peut être sûr de ce qu’il va obtenir.
La Bourse éthiopienne de marchandises est en relation avec diverses Bourses de marchandises à travers le monde, ce qui fait qu’un négociant de l’Inde peut, par exemple, acheter à terme des lentilles éthiopiennes, qui sont très recherchées.
Quant au principal produit d’exportation de l’Éthiopie, le café, 461 producteurs sont devenus membres de la nouvelle Bourse pour une période d’un an. « Nous allons disséminer les cours de New York dans notre Bourse, et nous transmettrons nos cours à la Bourse de New York. Il s’ensuit que si on examine les cours du café éthiopien, du café colombien ou du café rwandais, on aura une base de comparaison », a dit Mme Gabre-Madhin.
Les négociants de produits agricoles sont nombreux à demander à devenir membre de la Bourse de marchandises, ce qui constitue un signe, selon elle, de la confiance des intervenants sur le marché. « Les inquiétudes au sujet du paiement et de la qualité du produit sont ainsi supprimées », a-t-elle indiqué.
Il est probable que les agriculteurs seront incités à vendre une plus grande partie de leurs produits sur le marché. Dans le système traditionnel, seulement un quart de la récolte de céréales est vendu sur le marché. Il s’agit maintenant que la Bourse de marchandises traite de la moitié de la production de céréales du pays d’ici à cinq ans.
Mme Gabre-Madhin a fait remarquer que la moitié des ménages ruraux de son pays achetaient plus de vivres qu’ils n’en produisaient. « Les gens pauvres achètent des vivres et en vendent aussi, ce qui veut dire que les marchés sont très importants, même pour des personnes dont le revenu est faible. »
La Bourse de marchandises fait cependant l’objet de critiques. Certains disent qu’elle ne va pas bien fonctionner parce que des représentants du gouvernement occupent 6 des 11 sièges de son conseil d’administration. Mme Gabre-Madhin estime quant à elle que la participation du gouvernement permettra à ce dernier d’apprendre rapidement comment l’économie de marché fonctionne.
Une autre préoccupation a trait au fait que la Bourse de marchandises est susceptible de contribuer à l’accroissement des prix alimentaires, qui ont doublé au cours de l’année écoulée. Si les pays limitrophes de l’Éthiopie achètent ses produits agricoles, il y aura alors moins de vivres pour ceux qui souffrent déjà de sous-alimentation dans le pays, disent des critiques.
Ce à quoi Mme Gabre-Madhin répond en disant que la Bourse de marchandises n’est pas une panacée pour les problèmes alimentaires de l’Éthiopie, mais qu’elle constitue un élément important d’une économie fondée sur l’agriculture.