L’océan Indien se cherche un avenir commun
Plus que jamais confrontées aux défis majeurs de la libéralisation des échanges, de la sécurité alimentaire, énergétique et maritime, les îles de la Commission de l’océan indien (COI) ont ouvert, hier à la Région, un séminaire sur leur “codéveloppement durable”. Les travaux doivent déboucher ce soir sur des feuilles de route concrètes et l’identification des financements associés.
Jamais, on a vu autant de délégations mauriciennes sur l’île qu’au cours des derniers mois. Ce séminaire, auquel participent aussi des représentants de la commission européenne, préfigure peut-être ce qui sera une véritable union régionale intégrée des îles de l’océan Indien.
Face à un monde en mutation accélérée, La Réunion et ses voisines cherchent à se serrer les coudes pour relever ensemble les défis qui se dressent devant elles. Et d’abord celui posé par la renégociation de l’Accord de partenariat économique (APE) entre l’Union européenne et les pays ACP, lesquels auront un impact direct sur les échanges entre la Réunion et le groupe CMMS (Comores, Madagascar, Maurice, Seychelles), du fait de la levée des barrières douanières.
Même si la signature de l’APE est repoussée à la fin de l’année, les îles de la COI ont décidé de l’anticiper en cherchant une position commune pour structurer leurs relations commerciales de façon adaptée à leurs économies. L’idée étant de viser la complémentarité, afin qu’aucune île ne prenne son essor en appuyant sur l’autre. Autre enjeu crucial, celui de la sécurité alimentaire, d’autant plus urgent que la flambée des denrées a généré une crise mondiale. Madagascar, en proie à des famines chroniques, et les Comores, classés parmi les pays les moins avancés de la planète, attendent du concret.
Vers une compagnie maritime régionale
Et vite. La perspective fait consensus : fort de son foncier, Madagascar veut et peut devenir à la fois son propre grenier et celui de l’océan Indien, sur un principe gagnant-gagnant, notamment pour le riz.
Pour accélérer cette coopération, il faudra résoudre la question du financement et de la lourdeur des procédures, notamment via le Fonds européen de développement (FED). Cette thématique alimentaire fera l’objet d’un atelier de travail ce matin, tout comme la question de la sécurité énergétique, dont l’acuité s’est encore accrue avec l’incroyable envolée du pétrole. Des pistes concrètes de partenariat régional doivent être définies, en partant notamment du savoir-faire réunionnais.
L’essor du photovoltaïque doit être organisé. Ravagé par la déforestation, Madagascar est très intéressé par le “fourneau portois” pour réduire sa consommation de bois. La Grande Ile jouit aussi de capacités hydrauliques fantastiques, mais l’argent manque pour les exploiter. Les énergies renouvelables y représentent l’opportunité de bâtir un autre modèle de développement. Maurice et les Seychelles se penchent sur l’expertise réunionnaise en matière de maîtrise de la demande et d’énergies marines. La Réunion lorgne quant à elle sur le jatropha, une plante malgache, qui pourrait devenir un agro-carburant de seconde génération. Dernier point au menu de la COI : la sécurité maritime.
L’idée de créer une compagnie régionale de transport fait son bonhomme de chemin. D’abord à cause du pétrole qui rend les importations de plus en plus coûteuses. Ensuite parce que les îles de la COI n’auront pas forcément les moyens d’accueillir des bateaux qui sont de plus en plus gros. Enfin à cause de l’exclusion progressive du sud de l’océan Indien des grandes routes maritimes, confortée peut-être par la fonte des glaces et la menace d’ouverture d’une route “arctique” au nord.