L'OCDE critique la politique agricole de 7 pays émergents
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Les économistes de l'institution doutent de la portée des mesures de soutien adoptées par ces États pour assurer leur sécurité alimentaire.
Dans un rapport de deux cents pages qu'elle vient de publier, l'OCDE passe à la loupe les politiques agricoles de sept pays émergents. Le contexte de volatilité qui s'est traduit par des hausses brutales des prix à partir de 2007 a conduit ces États (Afrique du Sud, Brésil, Chili, Inde, Ukraine, Chine et Russie) à adopter des mesures spécifiques afin de garantir leur approvisionnement alimentaire.
«Les mesures les plus courantes ont consisté à réduire ou à suspendre les droits d'importation sur les produits alimentaires, ou à imposer des obstacles à l'exportation, par exemple sous forme de taxes comme en Ukraine et en Inde», explique Andrzej Kwiecinski, coordinateur de cette étude qui met en doute l'efficacité de ces mesures. Certes, «elles sont susceptibles de réduire les risques de pénuries alimentaires à court terme mais sont de portées limitées, car elles ne permettent pas de cibler les plus nécessiteux et pénalisent des secteurs vitaux pour l'économie de ces pays» .
Un moteur de la croissance
En Inde par exemple, les limitations à l'exportation sur le riz ont affecté les consommateurs du Bangladesh et découragé les riziculteurs indiens à investir dans l'agriculture. Un secteur qui emploie pourtant 52 % de la population active et représente un moteur de la croissance. En Ukraine, les quotas d'exportation ont entraîné un manque considérable dans les céréales et réduit les recettes totales à l'exportation, d'une activité qui représente 7,6 % du PIB.
Autres mesures de soutien mis au ban dans ce rapport : les subventions à l'achat d'intrants, c'est-à-dire d'engrais et de fongicides destinés à stimuler la production. «S'il est indéniable que les prix de ces produits requérant de l'énergie ont augmenté, reconnaît Andrzej Kwiecinski, il convient d'appliquer ce type de mesures avec beaucoup de prudence.» En Chine par exemple, «seulement 30 % des quantités utilisées seraient suffisantes pour assurer les mêmes rendements».
Avec des conséquences notoires pour l'environnement. Les auteurs de l'OCDE pointent aussi du doigt les soutiens directs aux produits comme le sucre, car ils mobilisent tous les moyens des agriculteurs aux dépens d'autres cultures.
À l'inverse, l'OCDE encourage les responsables de ces sept pays à développer des initiatives plus libérales telles que les assurances couvrant les agriculteurs contre les aléas économiques, sanitaires ou climatiques. «Elles sont à même de réduire la nécessité d'intervenir sur les marchés et d'aider les exploitants à formuler des stratégies adaptées des gestions des risques.»
Les pays de l'OCDE sont-ils pour autant les plus crédibles pour donner des leçons aux pays émergents ? Ils sont les plus interventionnistes et consacrent 368 milliards de dollars au soutien de leur agriculture, soit près de cinq fois plus que les sept pays étudiés. Un combat inégal.