jeudi 15 mai 2008

Zimbabwe: l'opposition hésite pour le 2nd tour, l'Union africaine intervient

HARARE (AFP) 3 May 2008


L'opposition zimbabwéenne poursuivait lundi ses consultations sur sa participation au second tour de l'élection présidentielle dont la date n'a toujours pas été annoncée, alors que l'Union africaine (UA) tentait de trouver une issue à la crise.

Le président de la Commission de l'UA, Jean Ping, s'est rendu à Harare où il a rencontré le président zimbabwéen Robert Mugabe, selon une source diplomatique.

"M. Ping et sa délégation ont été reçus par M. Mugabe. Les discussions ont été très constructives et ont permis un tour d'horizon complet de la situation, et d'examiner sous tous ses aspects" la crise électorale, a indiqué un diplomate africain proche de l'UA.

M. Ping, accompagné des commissaires de l'UA aux Affaires politiques et à la Paix et la sécurité, "a également eu une séance de travail avec le président de la Commission électorale du Zimbabwe au cours de laquelle ils ont examiné le déroulement du processus électoral depuis son commencement", selon la même source.

Cette visite n'a pas été officiellement confirmée à Harare.

Le Mouvement pour le changement démocratique (MDC) avait indiqué ce week-end que son leader, Morgan Tsvangirai, arrivé en tête du scrutin présidentiel du 29 mars sans officiellement remporter la majorité absolue, ferait une déclaration lundi sur son intention de participer ou non au second tour.

Mais selon son porte-parole George Sibotshiwe, aucune décision n'a encore été prise.

Le MDC a jusqu'à présent toujours affirmé que M. Tsvangirai l'a emporté au premier tour et que M. Mugabe, au pouvoir depuis 28 ans, doit céder la place.

Selon les résultats de la Commission électorale du Zimbabwe (ZEC) annoncés vendredi, cinq semaines après le scrutin, le chef du MDC n'a toutefois remporté que 47,9% des suffrages, contre 43,2% pour M. Mugabe.

Le MDC a rejeté ces résultats, les qualifiant de "scandaleux", tout en sachant qu'un boycott du second tour serait synonyme de nouveau mandat pour le président sortant.

Le second tour doit en principe avoir lieu dans les trois semaines suivant l'annonce des résultats, mais la Commission n'a pas encore communiqué de date.

Son porte-parole, Dominico Chidhakuza, a écarté lundi l'idée d'une annonce imminente: "je ne peux vous donner de date car il y a encore des problèmes dont nous devons discuter".

Nombre d'observateurs estiment que M. Mugabe et son parti, l'Union nationale africaine du Zimbabwe-Front patriotique (Zanu-PF), qui a perdu le 29 mars le contrôle de la Chambre des députés, veulent gagner du temps.

"J'imagine qu'ils essaient toujours de se faire à l'idée qu'ils ont perdu la majorité au Parlement, qu'ils sont sur le point de perdre la présidence et qu'ils n'ont pas encore fait assez pour éviter cette défaite", estime Jonathan Moyo, ancien porte-parole présidentiel entré en dissidence.

"Ils sont en deuil, ils ont besoin de 40 jours et 40 nuits", ironise cet ancien ministre de l'Information, aujourd'hui député indépendant.

L'épouse de M. Mugabe, Grace, a participé ce week-end à une cérémonie où des vêtements et des couvertures ont été distribués à des victimes présumées du MDC, à Chiendambuya (environ 160 km à l'est de Harare).

"La Zanu-PF est au pouvoir par les urnes depuis 1980, si elle avait voulu truquer le résultat des élections, elle l'aurait fait depuis longtemps", a-t-elle affirmé.

Selon le ministre de l'Information, Sikhanyiso Ndlovu, cité par la radio nationale, la Zanu-PF a commencé à se mobiliser pour ce qui n'est pas, d'après lui, "un deuxième tour ordinaire", mais "une guerre" contre les "forces occidentales" représentées par le MDC.

Les enseignants ont pour leur part menacé lundi de se mettre en grève la semaine prochaine si le gouvernement et les forces de l'ordre ne font pas "immédiatement" cesser les violences post-électorales, dont beaucoup d'entre eux sont victimes.