Croissance mauricienne : timidité du FMI dans ses prévisions
Le vice-Premier ministre et ministre des Finances, Rama Sithanen, qui participe actuellement à l'assemblée générale annuelle conjointe du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque mondiale, à Istanbul, en Turquie, devra trouver à redire quant aux dernières prévisions de croissance économique pour Maurice. En effet, l'IMF Outlook for Sub-Saharan Africa fait preuve de grande timidité dans ses prévisions pour les deux prochaines années pour l'économie mauricienne avec un taux de croissance nettement inférieur aux 2,7% de la Banque de Maurice et du Central Statistical Office (CSO). Ce rapport du FMI a été publié officiellement hier après-midi. D'autre part, les statistiques compilées par le FMI indiquent une nette progression de la dette étrangère du PIB de Maurice d'ici à 2010, soit de 8,8% du Produit intérieure brute (PIB) en 2008 à 12,8% du PIB.
Les principaux indicateurs économiques élaborés par le FMI dans le sillage de la crise économique internationale représentent une véritable douche froide à l'hôtel du gouvernement où il était question de taux de croissance dans la fourchette de 5 à 6% l'année prochaine dans une tentative de doper la création d'emplois face au spectre du chômage. En pour 2009, le FMI prévoit une croissance économique de 2,1% contre 6,6% en 2008 avec des projections bien moins positives pour 2010 où le taux n'est que de 2%.
Le seul paramètre évoluant de manière positive pour le FMI au cours de ces deux ans demeure l'inflation avec des prévisions de 6,4% en 2009 contre 8,8% en 2008 et un taux de 4% en 2010. Du côté des investissements, le taux subira une baisse à 22,7% du PIB contre 29,8% en 2008 alors que le FMI constate un véritable écroulement du "Savings Rate" à Maurice, soit 8,6% en 2009 contre 16,1% en 2008. De son côté, la Banque de Maurice partage ces appréhensions quant à la tendance à la baisse de ce paramètres en faisant ressortir officiellement que "concern was also expressed about the low national saving rate forecast at 14,3 per cent of GDP for 2009 and which is expected to be revised further down".
Au chapitre de la dette extérieure, la situation établie pour Maurice dans l'IMF Outlook for Sub-Saharan Africa n'est guère brillante avec l'External Debt to Official Creditors, passant de 8,8% du PIB en 2008 à 12,8% en 2010 en transitant à 9,5% du PIB cette année. En ce qui concerne la dette locale, les dernières statistiques officielles publiées par la Banque de Maurice démontrent que du mois d'octobre de l'année dernière à août dernier, soit en dix mois, la "Central Government Debt" a augmenté d'au moins Rs 11 milliards pour atteindre Rs 119,1 milliards.
Au cours de ces dix derniers mois, les "Short-Term Obligations" (remboursables en moins de 12 mois) contractées par le gouvernement sur le plan local ont augmenté de Rs 8,5 milliards, soit Rs 54,9 milliards contre Rs 46,4 milliards en octobre 2008. La situation au niveau des "Medium-Term Obligations", (remboursables entre douze mois et cinq ans), représente un accroissement de l'ordre de Rs 2 milliards pour se retrouver à Rs 51,9 milliards. Par contre, l'on notera une baisse de Rs 1 milliard dans les "Long-Term Obligations" à Rs 12,2 milliard.
En guise de préambule aux prévisions du FMI, Antoinette Sayeh, directeur pour l'Afrique au FMI, trouve que "the global economic crisis has hit sub-Saharan Africa hard, reducing economic growth to just one percent in 2009 after a period of sustained high economic growth". Le FMI ajoute que "the crisis will likely slow, if not reverse, progress on poverty reduction. Unemployment and under-employment, already endemic, have likely risen across the region."
Dans ses perspectives, le FMI met en garde contre les "Downside Risks" aux économies d'Afrique sub-saharienne tout en faisant état de "Cautious Optimism". Cette institution recommande le maintien des politiques monétaires et budgétaires accommodantes. "Pourtant, les risques sont grands de voir la situation s'aggraver. Par conséquent, partout où cela est possible, les services du FMI recommandent de maintenir des politiques budgétaires et monétaires accommodantes jusqu'à ce que la reprise économique soit bien enclenchée. À mesure que la reprise montera en régime, il faudra que la politique budgétaire accorde moins d'importance aux objectifs de stabilisation au profit des considérations de moyen terme, notamment la viabilité de la dette", ajoute le rapport rendu public, hier.
De son côté, la Banque de Maurice souligne dans le "Monetary Policy Statement" émis mardi dernier que "the domestic economy continues to be constrained by weak demand in main export markets. Key export sectors are estimated to have contracted in the first semester while other economic sectors have slowed down significantly". A ce stade, la performance au cours du premier trimestre de 2009 indique que "the economy may have contracted by a full percentage point relative to the fourth quarter of 2008".
La Banque de Maurice, qui soutient que "the economy may have reached a trough in the first quarter of 2009 and may have begun to recover progressively thereafter", fait également état d'une"general decline in the growth rate of credit to the business and household sectors." Elle ajoute plus loin que "the low interest environment has not spurred strong demand for credit by the private sector. The expansion of credit to the private sector has continued to deline, attaining 9,6% in the year to July 2009, but still remains at a relatively comfortable level".
Justifiant l'éventualité d'un taux de croissance révisé légèrement à la hausse, soit 2,7% cette année, le communiqué de la Banque de Maurice note que "the Monetary Policy Committee anticipates a better performance of the economy in the second half of 2009. The Monetary Policy Committee is also of the view that the downside risks to the growth outlook have further diminished. It noted that fewer job losses than initially anticipated had been recorded. Although the labour makey may reflect trends in the borader economy with a lag, it is not expected to weaken much further".
Perspectives: Le sucre pour sauver la mise
A environ un mois de la présentation à l'assemblée nationale du budget 2010, les dernières prévisions sur l'économie formulées par le Central Statistical Office indiquent une révision nominale à la hausse du taux de croissance, soit de 2,5% à 2,7% en 2009. Cette révision se justifie par des possibilités d'exportation de sucre raffiné et de sucres spéciaux. Par contre, les "Export-Oriented Enterprises" et la filière du textile enregistreront une décélération de la croissance avec la confirmation de la régression d'au moins 95 000 touristes en 2009 par rapport à l'année dernière. Dans la conjoncture, les perspectives dans les principaux secteurs économiques sont les suivantes :
Sucre : Production d'au moins 490 000 tonnes et des perspectives positives pour le sucre raffiné et les sucres spéciaux avec une croissance de 18,2% contre 3,7% en 2008
Agriculture : Progression de 5% dans la production contre une régression de 0,4% en 2008, conséquence des efforts annoncés dans le cadre du "Food Security Programme"
Secteur manufacturier : Progression nominale de 0,9% contre 3,2% en 2008 avec une baisse de 4% dans la filière textile et de 0,8% pour l'ensemble des entreprises tournées vers l'exportation
Construction : Croissance à la baisse, soit 2,5% en 2009 contre 11,1% l'année dernière avec les projets d'infrastructures dans le public pesant de tout leur poids
Hôtels et restaurants : Baisse de 8,8% avec 835 000 touristes attendus, soit une baisse de 95 000 comparativement à l'année dernière. Les recettes brutes du tourisme devront être de Rs 36 milliards contre Rs 41,2 milliards l'année dernière
Transport et communications : Performance à la baisse, notamment 5,3% contre 6% l'année dernière
Secteur financier : Croissance réduite presque de moitié, 5,9% en 2009 contre 10,1% en 2008
Business Activities : Croissance de 8% prévue contre 10,8% en 2008
Consommation : Réduction dans la croissance de moitié à 3%.